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risques psychosociaux liés à l’organisation du travail

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Les risques psychosociaux dus à l’organisation du travail ne sont pas les plus combattus dans l’entreprise et ce , pour deux  bonnes raisons:

  • la première d’entre elles mais aussi la plus simple à réaliser, est que les managers qui dirigent l’organisation du travail préféreront toujours mettre en cause tout- sauf l’organisation du travail – ce qui risque de mettre en cause les méthodes de management. En partie,ils se trompent d’ailleurs, car l’organisation dépasse le seul cadre du management, mais englobe aussi bien l’ensemble des procédures et des usages qui ne sont pas forcément issues des méthodes de management, mais peuvent être liées à des causes ayant trait à l’histoire de l’organisation et pour lesquelles le management actuel n’y est pour rien. 
  •  la deuxième raison est moins visible: elle tient aux modèles d’analyse utilisés pour analyser les facteurs contributifs aux risques psychosociaux et notamment, le stress au travail, les violences et le harcèlement.

Ces modèles sont en fait statiques et mettent en relation des facteurs statiques censés expliquer le stress au travail. Par exemple un de ces facteurs statiques pour expliquer le stress, c’est l’intensité du travail, sa complexité.  Ces modèles  nous expliquent alors « que plus le travail est intense et complexe et moins le salarié dispose d’autonomie ( latitude décisionnelle) et moins il dispose de « soutien  » de la part de ses collègues et/ou du management, et plus il est » stressé ».

Ces modèle de compréhension du stress sont en fait inspirés de celui de Karasek* et sont assez dominants parmi ceux qui  pensent la prévention, et apparemment à l’INRS et à l’ANACT*, on s’en inspire grandement.

Seulement voilà : si ce type de modèle peut justifier d’une corrélation entre certains facteurs, il ne porte pas à une compréhension dynamique des phénomènes qui originent cette corrélation et singulièrement, n’amène pas à répondre à cette question:

qu’est ce qui génère les facteurs que l’on constate  » d’intensité et de complexité » sous contrainte de « faible latitude décisionnelle » et de « manque de soutien du salarié »,  au point de conduire au stress, aux violences et aux harcèlements?

Faute de conçevoir les dynamiques productrices de risques psychosociaux et à s’en référer aux modélisations  statiques, la prévention, au lieu de situer les origines et les causes des risques , permet de les réguler à partir d’un système de compensation. Ainsi va-t-on apprendre au salarié à « gérer son stress « plutôt que de chercher la cause du stress, car dans un modèle statique, effectivement, bien gérer son stress ou ne pas produire de stress sont équivalents!

Sauf que la prévention nous indique un ordre de prévention, et celui ci exclue nettement  l’équivalence entre l’élimination des causes du risque et la compensation de ses effets. Faut-il rappeler la logique de la prévention, clairement établie par le code du travail à l’article L4121-2?

 

norm 4

 

 

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Ainsi, les préconisations inspirées de ce type de modèle à la « karasek » viseront , non pas à ne plus générer de risques psychosociaux, mais à en compenser certains  de ses effets: des mesures de prévention qu’on dira « secondaires » dans la prévention des risques psychosociaux, et qui viseront surtout à pallier aux conséquences qu’ils entraînent  et non pas à  réduire ou à éradiquer leurs causes génératrices . Dès lors, elles ne sont pas conformes à l’esprit de prévention qu’énonce en toutes lettres le code du travail en son article L4121-2

Autrement dit, l’utilisation de ces modèles , qui foisonnent en psychologie du travail (et qui prévalent partout notamment à l’ANACT) , conduit à penser la prévention en terme de prévention secondaire et non pas en terme de prévention primaire.

C’est ce qui explique – au delà de la plus ou moins bonne volonté des managers – le foisonnement des mesures de prévention secondaire et la rareté des mesures de prévention primaire dans la plupart des plans de prévention des risques psychosociaux  dans les établissements, entreprises  établissements ou administrations.

Car pour penser la prévention primaire, il faut penser en terme de dynamique la logique de production continue des risques psychosociaux.

Autrement dit ,  penser la prévention primaire ,c’est penser à enrayer la production dynamique des risques psychosociaux et empêcher que ceux ci ne soient générés, plutôt que de s’attaquer aux « facteurs » qu’ils génèrent.

Et pour que cette prévention soit primaire, et non pas secondaire , il faut s’immiscer dans la logique de production de ces risques et anticiper sur les processus qui vont les générer.

C’est plus compliqué que de pallier aux conséquences quand elles sont déjà présentes, car il faut penser, en terme dynamique, leurs processus générateurs et non pas en terme statique, leurs facteurs conséquents.

Par exemple, un des termes générateurs des risques psychosociaux est certainement l’isolement compétitif dans lequel une certaine logique organisationnelle précipite petit à petit le salarié. Ne pas laisser s’installer cette logique d’isolement compétitif est  un acte de prévention « primaire ».

Instaurer des médiations juridiquement sécurisées pour enrayer , en amont  (dans les services par exemple) des processus  pouvant dégénérer  en agressivité et en débordements ( violences ou harcèlements)  entre salariés et hiérarques,  ou entre salariés eux mêmes, est aussi un acte de prévention « primaire ». Au fait ,il existe une loi dite Loi Auroux, qui en permettant la mise en place des groupes d’expression sur les conditions de travail, permet de sécuriser juridiquement l’expression des salariés et qui serait une excellente prévention primaire contre l’apparition des risques psychosociaux, en combattant l’isolement du salarié , en constituant in groupe de soutien original de pairs permettant l’échange sur les situations de travail délicates qui peuvent s’avérer révélatrice de stress , de violence ou de harcèlement. Pourquoi cette faculté de constituer de tels groupes, juridiquement protégés est-elle si peu utilisée à titre de prévention primaire des risques psychosociaux?

Tout ce qui contribue à ce que les processus de violence , de stress et de harcèlements, ne soient pas générés, est de l’ordre de la prévention primaire. Tout ce qui se contente de parer à ses conséquences, est de l’ordre de la compensation, et ne peut être considéré comme prévention primaire susceptible de ne plus générer les risques psychosociaux.

Or la prévention  primaire, à notre connaissance, n’est pas des plus pratiquées. Beaucoup d’entreprises , par contre, préfèrent la prévention secondaire, voir tertiaire : celle qui répare et conduit à externaliser le problème organisationnel et à renvoyer le salarié « malade de son travail » vers un « numéro vert » ou un psychologue extérieur, comme si c’était le salarié l’origine du problème et non pas l’organisation du travail.

Aussi, les CHSCT doivent ils être conscients de cela:  si eux ne défendent pas la prévention primaire, qu’ils ne comptent pas vraiment sur leurs managers pour le faire. Car même si ces managers se disent » formés aux risques psychosociaux »  ,ce sont  sont aussi eux qui , le plus souvent, sont à l’origine des  risques psychosociaux générés par  les processus de production et d’organisation qu’ils sont chargés de mettre en place!

* le modèle de Karasek ainsi que celui de Siegrist, sont ceux à partir desquels est génralement actuellement pensée la prévention des risques psychosociaux

** ANACT: Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail

INRS: institut national de Recherche et de Sécurité

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pour une prévention organisationnelle du harcèlement moral


3 commentaires

  1. […] conditions du flou du travail sont un facteur de développement du stress au travail pour les salariés, inquiets de leur présent et pour leur […]

  2. […] et pèse alors comme une contrainte forcément démesurée (sans mesure humaine), contribuant au stress au travail (dont la définition est la différence de perception entre contraintes et ressources au […]

  3. […] charge de la prévention et le CHSCT en premier lieu, doivent s’attacher surtout à prévenir les causes organisationnelles qui ouvrent le champ libre aux effets de harcèlement moral, de manière à prévenir son occurrence […]

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